Vieilles légendes du pays

 

L'as aouvida la tsacha voulante qué vira chu pivouls da Leïdja ?

L'as tu entendue la chasse volante qui tournoie au-dessus des peupliers de Leïdje ?

Il paraît que par les nuits sans lune, on entendait, parfois, des cris, des sonneries de trompes qui faisaient penser à une chasse à courre qui passait. Sans doute s'agissait-il de quelques vols d'oies sauvages, égarées, qui tournoyaient au-dessus de ce petit plan d'eau qui se forme, toujours d'ailleurs, dans le creux du pré de Jeanne Decq.

Et les gens étaient effrayés ou feignaient de l'être. C'était avant l'électricité, on n'avait que des lanternes.

 

La bierra d'a la Crou del Bellet

Le cercueil de la Croix du Bellet

A la croix du Bellet, carrefour des chemins de la Roche, celui de la Boussière et de la grotte, bien connu. Quand on y passait seul, la nuit, on pouvait rencontrer un cercueil en travers du chemin. Ce cercueil parlait, disait : "Ne m'enjambe pas sinon tu mourras dans l'année". Il fallait donc repartir au village chercher du renfort pour déplacer délicatement le cercueil et le remettre en place. Ainsi il ne pouvait rien vous arriver.

 

Lou diable da la foud del Drac

Le diable de la fontaine du Drac

C'est une fontaine, une source un peu profonde, située au-dessus de Chauffour à droite en remontant vers la Gorce. Il n'était pas prudent d'y aller puiser l'eau une fois la nuit tombée. On risquait d'y rencontrer le Diable avec son battoir, il frappait dur cet énergumène tout noir aux oreilles pointues. Le mot Drac ne veut-il pas dire d'ailleurs incarnation du Diable. Aucune femme ne se serait risquée à aller chercher de l'eau la nuit à cette fontaine.

 

Las dumeigelles da la Tourelle

Les demoiselles de la Tourelle

La Tourelle, petite tour, se trouve au croisement de la grand-route D950 et de la petite route qui va au château d'Arnac. C'était il y a bien longtemps, bien avant que le cimetière soit aménagé. les nuits sans lune, on pouvait rencontrer quatre ou six "demoiselles qui dansaient". leurs pieds lançaient des flammes bleues (effrayant spectacle) et bien sûr, on s'enfuyait, surtout si on était seul. On pense qu'il s'agissait de quelques feux follets, l'endroit étant humide l'hiver.

 

La Dama blantscha dal chastel d'Arnac

La Dame blanche du château d'Arnac

Il y avait autrefois un sentier qui traversait la propriété du Château pour aller rejoindre la route de Chenaillers. Cela faisait un petit raccourci. Mais on passait sur une propriété privée et qui plus était celle du châtelain. Un jour ou plutôt un soir, les gens qui rentraient de la foire à pieds eurent une grande frayeur. Un large forme blanche s'ébroua devant eux comme une énorme mariée qui sautait et écartait ses voiles blancs dans la nuit. Ils rebroussèrent chemin et le racontèrent dans le voisinage. Si bien que plus personne n'osa plus passer par ce sentier. C'était parait-il, le valet de Monsieur qui s'était déguisé avec un drap de lit pour justement faire peur aux passants afin que personne ne "viole" plus la propriété de ce Château.

D'où viennent toutes ces légendes ? Pourquoi les racontait-on ? Nos anciens étaient ils à ce point peureux ou faisaient-ils semblant d'avoir peur ? On ne sait...

Quant à moi, je les tiens d'Aline Gasquet qui les racontait à la veillée chez ma tante Marie-Louise. Marie Chèze aussi aimait en parler. Elles les défendaient en disant qu'elles n'y croyaient pas mais sait-on jamais. Il me semble bien qu'autrefois on n'aimait pas sortir la nuit, l'ombre à peine éclairée par les faibles lueurs de la lanterne ou du "blandou" (sorte de torche de paille) laissait libre cours à toutes les imaginations. La "fée" électricité a fait disparaître à jamais tous ces fantasmagories.

Edmond Rougier